Les dangers de l’expertise
L’expertise ne saurait assurément se concilier avec une quelconque sérénité ou quiétude. Face à l’objet étudié, l’expert doit sans cesse interroger, enquêter et douter avant de pouvoir parvenir à se prononcer. Un premier danger existe ainsi lors de la mise en œuvre de l’expertise elle-même, le professionnel devant se garder de toute sujétion tant vis-à-vis de l’objet étudié que du commanditaire. L’indépendance constitue ici un précieux rempart afin de protéger l’expert des dangers d’une certaine évolution contemporaine du marché de l’art, marquée tout à la fois par une financiarisation de nombreux domaines et par une accélération de la temporalité des transactions. Cette évolution a emporté, pour diverses raisons, une judiciarisation importante du marché entraînant corrélativement une mise en cause plus régulière de la responsabilité des experts, devenus des garants pour les maisons de ventes, des adversaires pour des acheteurs peu diligents et déçus de leur acquisition ou encore des rivaux indélicats pour certains confrères.
Pour autant, la mise en œuvre d’une procédure judiciaire peut s’avérer, dans certaines hypothèses, vouée en elle-même à l’échec. Lorsque l’expert agit en dehors de la perspective d’une vente, par exemple à l’occasion de la rédaction d’un catalogue raisonné ou de la délivrance d’un certificat d’authenticité, sa responsabilité est désormais écartée au nom de la liberté d’expression. Celle-ci constitue le corollaire de l’indépendance auquel l’expert doit s’astreindre, quand bien même aurait-il été sollicité contre rétribution, tel qu’a pu le rappeler la cour d’appel de Paris le 29 juin 2021. Les tribunaux retiennent également qu’une procédure en référé-expertise visant à faire reconnaître judiciairement l’authenticité d’une œuvre qui s’avérerait déniée par tel ou tel spécialiste ne peut plus aboutir. Si la menace d’un procès existe, la protection de l’expert intervenant dans ce cadre précis est dorénavant acquise et le danger écarté.
Il n’en est pas de même dans d’autres hypothèses, notamment lorsqu’est remise en cause la description réalisée par un expert d’une oeuvre d’art ou d’un objet de collection au profit notamment de maisons de ventes aux enchères publiques.
L’intégralité de cet article est à retrouver dans le journal de la Compagnie nationale des experts du mois de juin 2022 sur ce lien. L’article opère un panorama de la jurisprudence rendue en la matière ces deux dernières années.
Un article écrit par Me Alexis Fournol, Avocat à la Cour et Associé du Cabinet.
Dans le cadre de son activité dédiée au droit du marché de l’art et au droit de l’art, le Cabinet assiste de nombreux experts-marchands notamment dans des problématiques relevant de leur activité d’expertise, qu’il s’agisse d’actions fondées sur la délivrance d’un certificat d’authenticité ou de la non-inclusion d’une oeuvre dans un catalogue raisonné, ou encore d’actions fondées sur la responsabilité civile des experts en raison de la description d’oeuvres d’art ou d’objets de collection. Avocats en droit de l’art et en droit du marché de l’art, nous intervenons également en matière de droit des contrats, de droit de la responsabilité, de droit de la vente aux enchères publiques pour l’ensemble de nos clients, aussi bien à Paris que sur l’ensemble du territoire français et en Belgique (Bruxelles).