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Qui peut être informé d’une déclaration de soupçon auprès de Tracfin ?

Article publié le 3 septembre 2024

La lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme est un enjeu majeur pour les autorités françaises. Dans ce cadre, les professionnels soumis à l'obligation de vigilance doivent, lorsqu'ils identifient une opération suspecte, effectuer une déclaration de soupçon auprès de Tracfin (Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins). Cependant, la question de la confidentialité de cette déclaration se pose : qui peut être informé d'une telle démarche ? Le client vis-à-vis duquel le professionnel a des soupçons peut-il être informé ?

La déclaration de soupçon : un dispositif confidentiel
La déclaration de soupçon est, par nature, une démarche strictement confidentielle. En vertu de l'article L. 561-15 du Code monétaire et financier, la révélation à l'intéressé (la personne ou l'entité objet de la déclaration, dont le client) ou à un tiers qu'une déclaration a été ou pourrait être effectuée est strictement interdite. Cette interdiction vise à préserver l'efficacité de la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT), en évitant notamment que les personnes concernées ne puissent dissimuler des preuves ou entraver l'enquête qui pourrait être ouverte.
Le client ne peut donc être informé de toute déclaration réalisée à son égard par le professionnel assujetti. Et cette interdiction prévaut, aussi bien contre toute information spontanément donnée ou après que le client a sollicité le professionnel assujetti.

Qui peut être informé d'une déclaration de soupçon ?

  1. Les autorités compétentes : La déclaration de soupçon est directement adressée à Tracfin, l'autorité chargée de recevoir, d'analyser et d'exploiter ces informations. Tracfin peut, en fonction des éléments recueillis, transmettre le dossier ou des éléments attachés au dossier à d'autres autorités compétentes, telles que les services de police judiciaire, le Parquet national financier (PNF) ou encore des autorités administratives ou judiciaires compétentes.

  2. Le professionnel déclarant : le professionnel ou l'entité qui a effectué la déclaration peut être informé des suites données à celle-ci par Tracfin. Cependant, cette communication reste très encadrée et limitée, notamment pour éviter toute atteinte à l'enquête en cours.

  3. Les collaborateurs impliqués dans la procédure : Au sein d'une structure professionnelle, seuls les collaborateurs directement impliqués dans la procédure de déclaration de soupçon peuvent être informés de la démarche. Le reste des collaborateurs de l’entité, notamment les salariés n’ont pas à connaître la mise en œuvre de la procédure, même s’ils en sont potentiellement à l’origine. Les personnes pouvant être ainsi informées sont généralement les responsables de la conformité de l’entreprise (compliance officers), s’il en existe, les avocats ou les conseillers juridiques lorsque la situation le justifie.

Les sanctions en cas de violation du secret de la déclaration
La divulgation d'une déclaration de soupçon à une personne non autorisée est sévèrement réprimée. Le Code monétaire et financier prévoit des sanctions pénales pour toute personne qui, sciemment, révèle une déclaration ou des informations qui s’en infèrent. Les sanctions peuvent aller jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 75.000 euros d'amende. Par ailleurs, la responsabilité professionnelle du déclarant peut être engagée.

La déclaration de soupçon constitue un outil crucial dans la lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme. Cependant, en raison de la sensibilité des informations qu'elle contient, la confidentialité de cette déclaration est strictement encadrée par la loi. Seules certaines autorités compétentes, ainsi que les professionnels directement impliqués dans la procédure, peuvent être informés de l'existence d'une telle déclaration. Le respect de ces règles est essentiel pour garantir l'efficacité des dispositifs de lutte contre le blanchiment et pour protéger les déclarants contre les risques juridiques et professionnels.

Un article écrit par Me Alexis Fournol,
Avocat à la Cour et Associé du Cabinet.

Dans le cadre de son activité dédiée au droit de l’art et au droit du marché de l’art, le Cabinet assiste régulièrement les professionnels du secteur (commissaires-priseurs et galeristes notamment) ainsi que leurs syndicats dans la mise en conformité de leur activité au regard des contraintes attachées à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Notre Cabinet d’avocats intervient aussi bien en France qu’en Belgique, notamment à Bruxelles.