Que faire en cas de contrôle par les douanes des obligations en matière de LCB-FT ?
Article publié le 22 août 2024
Corollaire de l’existence d’obligations à la charge de certaines entités en matière de LCB-FT, le contrôle du respect de leurs obligations peut s’avérer, pour ces entités, source de difficultés d’appréhension. Les agents des douanes disposent de la faculté de contrôler les assujettis du secteur du marché de l’art et du commerce de biens et d’objets de collection dans le respect de leurs obligations en matière de lutte contre blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
Qui peut être contrôlé ?
Tous les acteurs du marché de l’art ne sont pas assujettis aux obligations en matière de blanchiment et de financement du terrorisme et fort logiquement, ne sont pas susceptibles d’être contrôlés par l’autorité de contrôle. Certains acteurs du marché sont spécifiquement concernés sous réserve de respecter également des seuils financiers.
Ces assujettis sont les suivants :
· les négociants, ainsi que les intermédiaires dans le commerce d’œuvres d’art et d’antiquités, terminologie particulièrement vaste recouvrant les galeries d’art, les antiquaires, les brocanteurs ;
· les opérateurs de ventes volontaires aux enchères publiques usuellement dénommés maisons de ventes aux enchères ;
· les personnes se livrant à titre habituel et principal au commerce de métaux précieux ou de pierres précieuses, comportant les professionnels du secteur de l’horlogerie, de la bijouterie, de la joaillerie, mais également les entreprises exerçant une activité d’achat et de revente de pierres et métaux précieux.
L’assujettissement de ces acteurs ne revêt heureusement pas un caractère systématique. En effet, le législateur a fixé un seuil financier, à hauteur de 10.000 euros pour une transaction ou une série de transactions liées entre elles. Le lien entre les transactions n’est aucunement explicité tant par les directives européennes que par le législateur français. Dès lors, cette notion est sujette à une certaine interprétation.
Qui contrôle ?
L’administration des douanes est l’autorité de contrôle des acteurs du marché de l’art. Le contrôle est diligenté par la Direction Générale des Douanes et des Droits Indirects (DGDDI) et, plus précisément, par des agents de la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED). Alors qu’autrefois le Conseil des Ventes Volontaires (désormais Conseil des Maisons de Vente) était doté du pouvoir de contrôle des opérateurs de ventes volontaires, celui-ci est dévolu depuis 2020 à la DGDDI, permettant une unification du contrôle de l’ensemble des acteurs du marché de l’art par une même autorité.
Comment se déroule un contrôle ?
La procédure de contrôle suit la réglementation propre au Code des douanes. En pratique, le contrôle se scinde en plusieurs phases. Préalablement au contrôle, l’acteur du marché de l’art assujetti reçoit un avis l’informant du contrôle et du motif de celui-ci, à savoir le respect de ses obligations en matière de blanchiment et de financement du terrorisme. Conformément au droit de communication légalement octroyé aux douanes, les agents peuvent exiger la communication de documents relatifs au contrôle diligenté. Les agents douaniers disposent du droit de procéder à la visite des marchandises et des personnes, leur permettant ainsi de procéder à un contrôle sur place, c’est-à-dire dans les locaux de l’acteur du marché de l’art. À l’issue du contrôle, un procès-verbal est établi et signé par les parties présentes et l’acteur du marché de l’art peut être conduit à transmettre des documents aux agents des douanes. À l’occasion de ce contrôle, les agents de la DNRED ont accès à l’ensemble des informations relatives à l’activité de l’acteur du marché de l’art. Ils procèdent à un examen de la mise en œuvre et du caractère adéquat, selon une approche par les risques, de l’organisation, des procédures internes et des mesures de contrôle interne.
Et après ?
La DNRED ne dispose pas d’un pouvoir de sanction, ce qui signifie qu’elle ne peut infliger à la galerie, au marchand, à l’antiquaire, à la maison de vente aux enchères ou au numismate la moindre sanction administrative ou pécuniaire. À l’issue de la phase de contrôle, plusieurs hypothèses graduelles sont alors à envisager. Celle-ci peut se satisfaire des éléments transmis et ne pas donner de suites au contrôle effectué. Elle peut également émettre un avis de mise en conformité afin que l’acteur assujetti respecte les obligations qui lui incombent. Enfin, elle peut transmettre le rapport établi à la Commission Nationale des Sanctions, permettant alors d’engager une procédure de contrôle, la CNS disposant du pouvoir de prononcer des sanctions administratives (interdiction temporaire d’exercer) ou pécuniaires (amendes) à l’encontre de l’entité morale mais également des dirigeants ou des salariés du fait de leur implication personnelle.
Que faire en cas de contrôle ?
L’avis de contrôle peut soulever des difficultés d’appréhension de la part de l’acteur assujetti. Il s’avère impératif de répondre aux sollicitations des agents douaniers et de s’inscrire dans une démarche de collaboration. Au regard de la nature des éléments pouvant être sollicités, il est opportun de se rapprocher de certains professionnels, tels que son expert-comptable et son avocat. Par ailleurs, et au regard de son aspect central au sein de la LCB-FT, la cartographie et la politique de gestion des risques doivent être présentées aux agents des douanes.
Un article écrit par Me Adélie Denambride
Avocat à la Cour et Collaboratrice du Cabinet
Dans le cadre de son activité dédiée au droit de l’art et au droit du marché de l’art, le Cabinet assiste régulièrement les professionnels du secteur (commissaires-priseurs et galeristes notamment) ainsi que leurs syndicats dans la mise en conformité de leur activité au regard des contraintes attachées à la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Notre Cabinet intervient aussi bien en France qu’en Belgique, notamment à Bruxelles.