Les documents écrits, annotés ou soulignés par Philippe Pétain, alors chef d'État en exercice, sont des archives publiques
En moins de six mois, la Cour de cassation aura eu à se prononcer par deux fois sur la fameuse vacation du 18 juin 2008 ayant donné lieu à la dispersion de documents écrits ou annotés par Philippe Pétain. Ces documents avaient été acquis par la librairie Jean-Claude Vrain, alors qu’une revendication par les Archives de France avait été réalisée avant la vente aux enchères publiques. Face à la réticence du libraire de restituer des documents considérés comme des archives publiques par l’administration, le Ministère de la Culture avait alors assigné le libraire afin de voir ordonner judiciairement leur restitution.
La cour d’appel de Paris avait conforté, le 24 novembre 2015, l’analyse de l’administration en retenant la qualité d’archives publiques des documents. Cette analyse vient d’être pleinement confirmée par la Cour de cassation, le 22 février 2017[1]. La première chambre civile énonce ainsi que l’arrêt retient, à bon droit, que le caractère public d’une archive de l’Etat est déterminé par le constat qu’elle procède de l’activité de celui-ci dans sa mission de service public, de sorte que la nature préparatoire ou inachevée du document est indifférente. Après avoir constaté que certains documents émanaient de Philippe Pétain, alors chef de l’Etat français, la cour d’appel a, selon la Cour de cassation, exactement décidé qu’ils avaient la qualité d’archives publiques. Quant au tapuscrit de l’appel du 18 juin 1940, qui avait été souligné ou coché par Philippe Pétain, la cour a fait ressortir que, même sans autre annotation de celui-ci, un tel document procédait de l’activité de l’Etat dans sa mission de service public, comme tel constitutif d’une archive publique.
Cette décision fait suite au refus de la Cour de cassation de transmettre au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la conformité de l’article L. 212-1 du Code du patrimoine, fondement légal de l’action en revendication de l’État en matière d’archives publiques. En effet, selon l’arrêt du 21 septembre 2016, la disposition contestée par la librairie avait déjà été déclarée conforme à la Constitution aux termes d’une décision du 9 juillet 2008 du Conseil constitutionnel[2].
Alexis Fournol
Avocat à la Cour
[1] Cass. civ. 1re, 22 févr. 2017, no 16-12.922, FS-P+B+I.
[2] Cass. civ. 1re, 21 sept. 2016, no 16-12.922.