Exhibition sexuelle et militantisme : le compromis nécessaire entre la liberté d’expression et la liberté de culte
Le 9 janvier 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi dirigé contre un arrêt de la cour d’appel de Paris ayant condamné à un mois d’emprisonnement avec sursis une jeune femme, militante du mouvement contestataire Femen, qui volontairement avait dénudé sa poitrine sur laquelle étaient inscrits les mots « 344e salope » dans l’église de la Madeleine, avant de procéder, sur l’autel, à un simulacre d’avortement à l’aide de morceaux d’abats, censés représenter le fœtus de Jésus.
Poursuivie pour exhibition sexuelle, la jeune femme faisait valoir le caractère à la fois militant et artistique de sa performance, dont le but était de « dénoncer « les campagnes anti-avortement » menées par l’Eglise catholique à travers le monde et notamment en Espagne et dans certains pays de l’Est ». C’est pourquoi, la prévenue invoquait au soutien de sa défense le bénéfice de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, consacrant le droit à la liberté d’expression, qui, selon elle, l’autorisait non seulement à manifester ses opinions mais aussi à communiquer ouvertement des informations ou des idées et ce, sans se voir censurée.
Pour autant, les magistrats de la Cour de cassation, s’accordant aux juges du fond, ont rappelé que, nonobstant l’importance du droit à la liberté d’expression, celui-ci ne peut faire obstacle aux restrictions rendues nécessaires par la protection des droits et libertés d’autrui. Aussi appartient-il aux juridictions « de concilier la liberté d’expression avec d’autres libertés d’égale valeur, telle que la liberté religieuse », soit de réaliser une balance des intérêts entre deux droits fondamentaux.
Dès lors, peu importent les mobiles ayant conduit aux faits de l’espèce, la liberté d’expression doit nécessairement se concilier avec le droit pour autrui de ne pas être troublé dans la pratique de sa religion, reconnu lui aussi par la Convention européenne des droits de l’homme, en son neuvième article. Or, selon la Cour de cassation, la condamnation de la militante retenue par la cour d’appel était justifiée dès lors que le délit d’exhibition sexuelle était caractérisé dans ses éléments tant matériels que moral et qu’une telle condamnation ne portait pas une atteinte excessive à la liberté d’expression dont est investie la militante.
Par Maxime Seiller
Stagiaire du Cabinet entre janvier et juin 2019.
Décision citée :
Cass. crim., 9 janv. 2019, no 17-81.618.
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