Le collectionneur peut anticiper sa succession de son vivant, en vendant ou en donnant tout ou partie de sa collection à une institution publique ou à une structure qu’il crée à cette fin. L’anticipation peut également consister en la rédaction d’un testament organisant sa succession après son décès.
Vendre sa collection
La mise à l’encan des collections rythme aujourd’hui le calendrier des ventes aux enchères publiques dans le monde. On ne compte plus les célèbres collections dispersées par les commissaires-priseurs : la collection Pierre Bergé et Yves Saint-Laurent en 2009 par Christie’s, la collection Jacques Grange par Sotheby’s en 2017, la collection de Peggy et David Rockefeller en 2018 par Christie’s.
Ces célèbres collectionneurs ont fait le choix de vendre une partie ou l’intégralité de leur collection avant leur décès ou de prévoir une telle vente à leur décès.
La vente de sa collection ne doit pas être sous-estimée par son propriétaire. Ce dernier doit être attentif lors des différentes étapes préalables à la vacation.
En premier lieu, le collectionneur doit être attentif aux conditions de vente proposées par la maison de ventes aux enchères. Ces conditions contractuelles peuvent être négociées afin d’obtenir les meilleures garanties quant au succès de la vente (le montant des frais vendeurs, les lots proposés à la vente, la date de la vente, la publicité). Un soin particulier peut également être porté à la réalisation d’un catalogue de vente incluant des photographies d’archives des peintures dans leur environnement, une notice biographique présentant le collectionneur, un texte de présentation de sa collection et des choix l’ayant guidé toute sa vie durant… Le choix de la maison de ventes et des experts est aussi important pour le succès de la vente. Enfin, le collectionneur peut envisager de reverser les sommes issues de la vente aux enchères à un ou plusieurs organismes d’intérêt général. Le versement de cette somme doit également être juridiquement sécurisé.
Le collectionneur peut aussi choisir de donner l’intégralité de ses œuvres ou une partie à une institution.
Créer une structure dédiée à l’accueil de la collection
Plutôt que de se séparer de ses tableaux et sculptures, le collectionneur peut souhaiter créer une structure dédiée à l’œuvre de sa vie afin d’en conserver l’unité et la cohérence. Toutefois, avant de choisir la structure opportune, il convient de vérifier la viabilité économique de ce projet. En effet, la création d’une structure dédiée et ses frais de fonctionnement (salaires, entretien du lieu d’exposition…) engendrent souvent un coût très élevé pour les héritiers. Si le projet du collectionneur vise à assurer la pérennité de sa collection au travers d’une structure dédiée, il est nécessaire de bien évaluer les ressources et les charges nécessaires à ce projet. À cette fin, il est par exemple possible d’envisager la vente de certains biens qui ne porterait pas atteinte à la cohérence de la collection.
Le collectionneur a le choix de la structure (fondation reconnue d’utilité publique ou fondation abritée, fonds de dotation, association), ainsi que le mode de fonctionnement, notamment en ce qui concerne les membres dirigeants. En premier lieu, un soin particulier doit être apporté au choix de la structure. En effet, le fonds de dotation ne peut recevoir de subvention de l’Etat ou des collectivités publiques. En revanche, certaines associations ne sont pas éligibles au mécénat. De même, une association peut plus facilement avoir une activité commerciale en lien avec l’exposition des œuvres de la collection (restaurant du lieu d’exposition, boutique de souvenirs…). Ainsi, le choix de la structure repose en partie sur les ressources envisagées pour garantir son fonctionnement. En deuxième lieu, la réflexion autour du fonctionnement et de l’administration de la structure est primordiale afin de sécuriser la gestion future de la collection. En troisième lieu, les statuts peuvent prévoir une clause spécifique afin de prévoir l’inaliénabilité de la collection ou les conditions de sa cession en cas de disparition de la structure.
Le don ou le legs à un musée public ou à une institution publique
Tant le collectionneur, de son vivant, que ses héritiers peuvent choisir de donner les tableaux, dessins, sculptures, vidéos et photographies qui composent la collection. Le don, ou la donation, constitue un moyen pour le collectionneur de céder gratuitement la propriété ses œuvres. Ces actes gratuits peuvent néanmoins être accompagnés de conditions ou « charges » garantissant pour l’avenir la volonté du donateur.
Donner sa collection ou une partie des objets d’art la composant à une institution publique (musée, collectivité territoriale, Etat) permet au collectionneur de les protéger et d’assurer leur exposition au bénéfice du public.
D’un point de vue pratique, l’institution publique dispose bien souvent des moyens financiers et humains nécessaires à la conservation et à la présentation des œuvres objet du don ou du legs.
En effet, les œuvres d’art intégrant les collections des institutions publiques par dons ou legs dans les collections de l’Etat font l’objet d’une inaliénabilité absolue, seule une loi pouvant autoriser l’institution publique à s’en séparer.
Même s’ils ne sont pas considérés comme des institutions publiques, une protection similaire existe pour les œuvres ayant fait l’objet d’un don ou legs à un musée de France ou un à Fonds régional d’art contemporain (FRAC). La loi limite à ce titre la possibilité pour ces acteurs de céder leurs collections, puisqu’une telle cession ne peut être réalisée qu’au profit de personnes publiques ou privées à but non lucratif (association, fondation…).
En outre, les dons ou legs à certains organismes sont exonérés de droits de mutation.
La protection de la collection par une personne physique (donataire ou héritier)
Il convient toutefois pour le collectionneur de prendre en considérations certaines contraintes juridiques essentiellement attachées au droit des successions.
Le don ou le legs et le respect de la réserve héréditaire
Le don ou le legs à un héritier qui souhaite poursuivre ou préserver la collection peut également être envisagé.
Le don manuel ou la donation sont des actes réalisés du vivant du collectionneur. Attention toutefois : s’ils portent atteinte à la réserve héréditaire d’autres héritiers, ceux-ci pourront pendant une durée de dix années après le décès du collectionneur envisager une action en réduction des libéralités afin de recouvrir le montant de la réserve qui leur était due. Le bénéficiaire du don d’œuvres d’art pourrait donc être assigné en justice dans le cadre de cette action. La personne qui a bénéficié du legs de la collection est aussi susceptible de faire l’objet d’une telle action.
La désignation d’un exécuteur testamentaire
Le testament du collectionneur peut également prévoir la désignation d’un exécuteur testamentaire. Cette personne aura pour mission de veiller à la parfaite exécution des dernières volontés du propriétaire des objets d’art. Le rôle de l’exécuteur testamentaire réside dans la défense de la validité du testament, dans la participation à son interprétation et dans la surveillance de son exécution.
L’exécuteur testamentaire peut notamment être chargé de créer une structure dédiée à l’accueil de la collection. Ainsi, il revêt un rôle particulièrement important pour défendre l’unité de la collection. Afin de permettre la meilleure exécution possible du testament, il est vivement conseillé de désigner un proche du collectionneur ayant une parfaite connaissance de sa volonté.
Le Cabinet Alexis Fournol accompagne les collectionneurs afin de les aider à anticiper les aléas des successions et met à leur disposition son réseau de professionnels du secteur. Il aide également les héritiers dans la délicate gestion de la succession et les accompagne dans l’ensemble des démarches à accomplir.